Le reporter Loti

Alain Quella-Villéger et Bruno Vercier, biographes connus de l’écrivain, dévoilent un demi-siècle de ses reportages écrits dans Pierre Loti- Le Monde en passant pour Le Monde illustré, L’Illustration ou encore Le Figaro. Des articles d’une grande modernité et parfois passés par au filtre de la censure.

On connaissait l’auteur de Pêcheurs d’Islande, Ramuntcho, ou Mon frère Yves, moins le reporter même si, dans tous ses romans, on sent l’homme qui a bourlingué et nourri ses écrits de son expérience. Avec Pierre Loti – Le Monde en passant (*), Alain Quella-Villéger et Bruno Vercier nous font partager une autre facette de l’auteur : celle du reporter qui, d’Istanbul, sa ville d’élection, à l’île de Pâques, en passant par la Birmanie ou la Terre de feu, « raconte » le monde.

Textes courts, épurés ou reportages plus étoffés : Pierre Loti (ci-contre), mort en juin 1923, s’intéresse à tout, peut aussi bien raconter L’Éclipse de lune à Constantinople que Venise en temps de guerre ou encore Les Exécutions de Salonique. Dans cet article publié dans Le Monde illustré en juin 1876, il écrit sans pathos : « Il faut reconnaître que les Turcs sont passés maîtres dans ces sortes d’opérations et qu’ils y procèdent avec une admirable simplicité ». Ce « jeune officier pauvre », qui « continue à dessiner et à fixer ce qu’il voit« , comme le définissent les auteurs, signe des articles d’une grande modernité.

Des articles qui lui ont valu parfois les foudres des autorités. Ainsi, ses articles très réalistes sur la guerre coloniale et la prise de Thuan-An, parus dans Le Figaro en mai 1883, ont provoqué un scandale politique en métropole : Loti sera même rappelé en France en décembre. Il est vrai, son reportage n’est pas « tendre » avec la puissance coloniale. Il écrit ainsi, décrivant sans barguigner le massacre des autochtones révoltés : « D’autres se jetaient à la nage dans la lagune, se couvrant la tête, toujours avec des abris d’osier et de paille, cherchant à gagner les jonques. On les tuait dans l’eau. Il y avait de très bons plongeurs, qui restaient longtemps au fond ; on réussissait tout de même à les rattraper quand ils mettaient la tête dehors pour prendre une gorgée d’air, comme des phoques. »

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