Les cauchemars d’un humanitaire

Ayant lui-même subi un traumatisme profond, Gregory court le monde, même quand il a refait sa vie avec une réfugiée tchétchène et son fils – eux-mêmes blessés au plus profond de leur âme. Régulièrement, l’infirmier très demandé sur le terrain se pose régulièrement la question de son inadaptation à une vie « normale ». Karine Giebel (ci-contre) écrit : « Grégory se demande s’il sera un jour capable de se réadapter à la vie en France tout en continuant à exercer son métier. Ou s’il parcourra inlassablement le monde et ses tragédies. »

En chapitres courts et nerveux, par un chassé-croisé entre les terrains de conflit et le camp de base de Grégory, dans son village des Alpes-de-Haute-Provence, Karine Giebel sait plonger le lecteur en quelques pages nerveuses au cœur de contrées dévastées par la guerre, les viols, les massacres, l’utilisation des enfants soldats, le tout vu à travers le prisme du regard des humanitaires. Ou du docteur Mukwege, ce célèbre chirurgien qui « répare » les femmes victimes de mutilations sexuelles (notamment !).

Laissant habilement « ouverte » la fin de ce récit mené de main de maître, l’auteure montre bien comment, petit à petit, malgré son apparente solidité, Gregory est dévoré par son métier et l’idée qu’il s’en fait, quitte à passer pour un rebelle incontrôlable aux yeux de certains chefs d’équipe. L’itinéraire d’un homme qui va de cauchemar en cauchemar, sans pour autant vouloir quitter le terrain.

Aussi à l’aise sur le terrain privé – les relations de l’infirmier avec son beau fils, presque muet et sujet à des accès de violence – que sur la description des crises internationales, Karine Giebel signe un récit prenant et cruel, décrivant bien la vie des sacrifiés de la vie, victimes d’intérêts politiques et économiques. On attend donc la suite…

(*) Ed. Récamier Noir

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